Abbaye Saint-Martin
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Sur la culture (Messe)

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Message  Pie de Valence Dim 8 Déc - 17:15

Sur la culture

L'évêque de Langres, après une pause au mois d'août et une messe en septembre en Bourgogne, reprenait son rythme de croisière avec sa promesse d'une messe mensuelle, tel qu'il s'y était engagé lors de son arrivée dans son diocèse.
Tandis que les cloches sonnaient, il entra dans sa cathédrale, revêtu, comme à l'ordinaire, de ses plus beaux ornements afin de faire honneur à sa fonction, accompagné des chantres et des musiciens de l'abbaye Saint-Martin de Langres, avec, à leur suite, les fidèles venus assister à la messe.
Quand les cloches se furent tues et que chacun se fut installé, s'éleva dans les airs
un hymne de Vêpres, afin que l'âme des fidèles s'élevât vers le Très-Haut.
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Pendant ce temps, l'évêque, devant l'autel, priait, puis, quand le chant prit fin, il se génuflexa et se signa au nom de Dieu, d'Aristote et de Christos, puis, toujours tourné vars l'Orient, le chant terminé, il entama la récitation d' une Prière de supplique à Dieu afin qu'il pardonne nos fautes que chacun reprit avec lui

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Nous te prions, Toi, Dieu, Créateur du Ciel et de la Terre, des Hommes et des choses, Toi l'Eternel, afin que Ta Grâce s'étende sur Nous.
Nous ne sommes que d'humbles pécheurs qui avons besoin de Ta lumière pour ne pas sombrer dans le péché et de Ton amour qui seul sait Nous pardonner pour nous remettre dans le droit chemin.
Amen.
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La prière terminée, il se tourna vers l'assemblée.
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Aujourd'hui, mes amis, nous parlerons des arts, de la culture et des sciences.
J'entends souvent dire que Dieu est ennemi de ceux-ci, qu'il n'a de faveurs que pour les travailleurs manuels et que d'ailleurs, seuls ces derniers auront accès au Paradis solaire car ils seraient les seuls à vivre dans la pauvreté de Christos.
Certains - les mêmes personnes souvent -, englobent dans leur opprobre de la culture, des arts et des sciences, tous ceux qui se chargent, à des titres divers, de la répandre, et notamment les hommes de lettres et de théâtre et les savants.
D'après eux, parce qu'ils ont la capacité à inventer des histoires, à jouer plusieurs personnages ou à posséder des instruments bizarres utiles à leur art, ces gens seraient des serviteurs de la Créature Sans Nom; ils détourneraient les Hommes de leurs devoirs pour les inciter à l'oisiveté et à l'impiété. Aussi, ils voudraient, aux mieux, que l'on enterrât ces pauvres gens uniquement de nuit et hors des cimetières consacrés afin qu'ils ne contaminent pas leurs prochains, au pire, qu'on les brûlât en place publique comme s'ils étaient des sorciers ! Et je ne doute pas que, dans certains endroits, il en soit ainsi, tant les superstitions peuvent avoir la vie dure.
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Et pourtant, rien n'est plus étranger à Dieu que l'idée de se défier de la culture, des arts, des sciences et des gens qui la répandent.

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L'évêque fit une légère pause, certain d'avoir crée son petit effet sur son auditoire, avant de reprendre
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Voici ce qu'il en dit dans le Livre de la Pré-Histoire, chapitre III
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" Les arts et les sciences furent alors conçues pour élever (Les Hommes) encore plus vers Dieu. Ils apprirent à composer de la musique, les chants devenant de plus en plus beaux et les instruments qui les accompagnaient de mieux en mieux conçus. Ils découvrirent les plantes qui soignaient les plaies et les maladies, afin que leur santé serve à glorifier le Très Haut plus longtemps. Ils inventèrent l’écriture, qui leur permit de conserver tout leur savoir pour les générations à venir.
Dieu était satisfait. Ses enfants se sublimaient dans la place qu’Il leur avait donnée
".
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Oui, mes amis, vous avez bien entendu: " Dieu était satisfait. Ses enfants se sublimaient" dans les arts, la culture et la science, c'est-à-dire que, grâce à leur pratique, ils élevaient encore plus leurs âmes vers le Très-Haut. Il faut donc faire litière de ces fables qui vouent les hommes de lettres, de théâtre et de sciences à l'Enfer lunaire. Le prophète Aristote, les Bienheureux Platon, Cicéron et Sénèque, n'étaient-ils pas, d'ailleurs, des philosophes, donc des hommes de lettres ? Et n'y a-t-il pas plus proches de l'amour et de l'amitié aristotéliciennes que ces savants, ces médecins, ces herboristes qui, par volonté d'améliorer le sort de leurs semblables, au fond de leurs laboratoires, explorent les possibilités offertes par la nature, donc par Dieu, pour ce faire ? N'y a-t-il pas plus proches de l'amour et de l'amitié aristotéliciennes que ces hommes de lettres et ses comédiens qui explorent les choses de la vie et cherchent à soulager les peines et les tristesses de leurs semblables par la réflexion et de divertissement ?
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" S’instruire est l’un des devoirs que nous impose Notre Créateur ; c’est pourquoi il a permis que chacun ait droit à une égalité des chances et que chacun puisse s’instruire, sans distinction dès que les fruits légitimes de son travail lui permettent de s’élever dans la société. Ainsi, seuls le travail et le talent établissent le fondement de la hiérarchie sociale de la cité idéale rêvée par Aristote. Aucun préjugé défavorable n'atteint quiconque du fait de ses origines sociales, à la seule condition qu'il s'intègre dans la société et qu'il lui apporte un concours sans réserve.
Aussi, tout homme qui refuse de s’instruire ou de s’élever dans la société contrevient au plan établi par Notre Créateur et se rend pareillement coupable des péchés de paresse et d’acédie en n’utilisant pas les facultés dont le Créateur l’a dotées ; il doit même être considéré comme un traitre à la société, car, en gâchant les talents que Dieu a mis en lui, il en prive une partie de ses semblables et les pénalise par sa paresse intellectuelle ".
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comme le fait remarquer l'apôtre Nikolos dans son épître sur le travail. Or, s'instruire n'est-il pas accéder à la science, à la culture et aux arts ?
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C'est pour me situer dans cette voie, tracée par Dieu, pour répondre à Ses desseins, que dès mon arrivée à Langres, en février de cette année, je vous disais:
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" J'entends aussi faire de ma cité épiscopale un lieu d'étude et de promotion de la culture, des sciences et des arts afin de participer activement à son rayonnement. J'ouvrirai à ce titre une grande bibliothèque publique, ouverte à tous, à l'église Saint-Martin. Ceux qui le souhaiteront pourront demander à y faire déposer leurs œuvres car je veux qu'elle soit la bibliothèque de tout ce que notre diocèse compte d'humanistes ".
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Aujourd'hui, même s'il me manque du temps pour l'étoffer convenablement, cette bibliothèque existe et vous est ouverte car je considère que l'un des devoirs de ma charge est aussi de lutter contre l'ignorance par la diffusion des arts, des sciences et de la culture.
Combien de savants, combien de médecins, combien d'artistes, inspirés par la lecture des anciens, n'ont-ils pas ainsi pu progresser plus vite vers la connaissance pour le bien de tous ?
Aussi,mes amis, il ne faut pas se défier des arts, des sciences et de la culture, car Dieu ne l'a pas voulu ainsi.
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Mais, allez-vous me dire, à raisonner, et à raisonner trop, ne risque-t-on pas de laisser son âme divaguer vers les noirs pâturages du doute, de l'incroyance, de l'impiété et de l'immoralité ?
Evidemment, ce risque existe, personne ne pourrait le nier, mais il n'existe que si notre foi, indépendamment de nos occupations sur Terre, manque de solidité ou n'est pas le guide, la boussole de notre vie. Ici, ce ne sont ni les arts, ni les sciences, ni la culture qui sont en cause, mais la capacité de l'esprit humain à céder aux pêchés de l'orgueil et de la vanité.

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Comme le faisait remarquer l'apôtre Nikolos, dans une controverse qui l'opposa à l'un de ses condisciples,
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« Il faut être pour penser et non pas penser pour être » et, il ajoutait, commentant cet épisode de sa vie pour l'un de ses élèves, « En vérité, me dit-il, les gens comme Escartus commettent le péché d’orgueil de trop raisonner et de se laisser emporter par la spéculation sur la réalité des choses : ils en viennent à nier les évidences qu’ils ont sous les yeux pour mieux appuyer leurs théories.
Vois-tu, Sénèque, toutes les choses qui nous entourent ont été créées par Dieu, par une pensée, née d’un être : c’est là la seule réalité possible. C’est parce que Dieu est qu’il a pensé. Si tu affirmes l’inverse, tu en viens à dire que la pensée est créatrice de tout, même de Dieu ; mais pour cela, il faudrait qu’il existe une force encore supérieure à Dieu et qui ne serait pas un être, mais une pensée immatérielle. Or, tu le sais, c’est impossible car personne n’est plus grand que Dieu.
»
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Si nous gardons cette vérité présente à l'esprit, il n'y a aucune raison de se méfier ou de rejeter les arts, la culture, la science et ceux qui les répandent autour de nous, pour le bienfait de tous et de toutes.
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Messe d'octobre 1461 écrite et dite par Monseigneur Pie II de Valence, évêque de Langres.

Pie de Valence
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